Internet et les écrans

 

“Allons enfants de la patrie, le jour de gloire…”

 

Le jour de gloire, c’était dans un grand gymnase de Paris: dans une ambiance très festive, 900 enfants entonnaient la Marseillaise pour la remise des permis piéton et Internet. Remettre le même jour les permis piéton aux élèves de CE2 et le permis internet aux élèves de CM2 n’est pas un hasard. On peut trouver une forte analogie entre naviguer seul dans la ville et se promener sur la toile. Un fait que souligne la page web du permis internet :

 

Le “Permis Internet pour les enfants” est un programme national de prévention pour un usage d’Internet vigilant, sûr et responsable à l’attention des enfants de CM2 et de leurs parents. Si avant de laisser circuler un enfant seul dans la rue, on lui apprend les règles de prudence indispensables (circulation routière, mauvaises rencontres, incivilités…),sur Internet, c’est la même chose. Avant de laisser un jeune utiliser Internet seul, il est indispensable de s’assurer qu’il a assimilé les règles élémentaires de vigilance, de civilité, et de responsabilité sur Internet.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le soir même, devant l’écran de sa tablette, mon fils m’appelait : “Papa, papa, viens, c’est important !” Sur l’écran, une discussion instantanée en cours, et ce message : “Coucou, je m’appelle Pauline, j’ai 17 ans et c’est la première fois que je joue à ce jeu. Et toi, tu t’appelles comment ?” Et mon fils qui demande : “Est-ce qu’il faut que je la signale ? Pourquoi elle me demande mon nom ? Elle voit bien mon pseudonyme pourtant…”

 

Bravo, fiston ! Belle vigilance… et je résiste à l’envie de lui arracher la tablette des mains et de lui dire : tu ne discutes pas avec des filles inconnues qui ont 6 ans de plus que toi ! La sensibilisation internet a porté ses fruits. Car il y passe du temps sur les écrans, à jouer. Les réseaux n’ont fait que l’effleurer. Je n’ai pas de doute que cela viendra, il n’est pas encore ado.

Non, si danger il y a à son âge, c’est plutôt de passer trop de temps face à l’écran.

 

Trop de temps, c’est combien de temps ?

Le psychiatre Serge Tisseron a élaboré un programme de prévention et établis des préconisations quant aux temps d’écrans en fonction de l’âge de l’enfant.

 

Ce sont les repères 3-6-9-12 :

– Pas d’écran avant 3 ans

– Pas de console de jeu avant 6 ans

– Pas d’internet avant 9 ans

– Pas de réseaux sociaux avant 12 ans

 

et ce tableau de recommandations :

Repères 3-6-9-12

 

 

Les risques d’une trop grande exposition aux écrans

– Mauvaise qualité de sommeil : vous savez, c’est la fameuse petite lumière bleue émise par les LEDs des tablettes, écrans de PC et Smartphones. Cette lumière envoie au cerveau, via les cellules de la rétine, le signal que c’est… l’aurore ! C’est que nos neurones sont programmés pour détecter cette lumière bleue qui naturellement indique le lever du jour, et y répondent en intensifiant l’activité cérébrale. Ils vont même jusqu’à stopper la sécrétion de mélatonine, l’hormone du sommeil. C’est valable pour les enfants, et aussi pour les adultes ! Difficile de s’endormir après une heure passée devant sa tablette…

Enfonçons alors une porte ouverte : le risque immédiat d’un sommeil de piètre qualité est évidemment la fatigue, une perte d’entrain et d’énergie, et une plus grande vulnérabilité aux petits virus qui traînent. Nous avons aussi vu précédemment que le sommeil est un facteur essentiel des apprentissages. Il y a de multiples causes possibles à la baisse des résultats scolaires, mais le temps passé devant un écran est un facteur important à considérer.

 

– Surpoids : la corrélation entre obésité et temps d’écran n’est plus à démontrer, les études sont multiples. Ce qui vient immédiatement en tête, c’est que quand on joue sur sa tablette, on ne fait pas de sport. L’enfant ne se dépense pas, n’est pas engagé dans un jeu actif. Mais cela va plus loin : quand on joue, souvent on grignote ! Machinalement. Sans conscience. Car quelle est la tâche prioritaire, celle qui accapare l’attention de l’enfant ? C’est le jeu, et le cerveau est bien plus occupé à gérer ce jeu qu’à signaler : “oh là, ça suffit, tu as assez mangé, tu sens bien que tu n’as plus faim.” Le signal de rassasiement passe au second plan.

 

– Modification du comportement : comme les notes, les réseaux sociaux favorisent la comparaison. Se comparer aux autres est souvent inévitable, mais ce peut être le chemin direct vers une baisse de l’estime de soi et de sa confiance en soi. L’enfant, ici plutôt l’adolescent, peut choisir de se replier, de s’isoler sur lui-même pour fuir la comparaison, ou même la violence ou le harcèlement.

 

Des conseils pour diminuer les risques

Serge Tisseron évoque trois axes essentiels :

 

– L’autorégulation : lui faire confiance, lui donner des durées limites, et lui rappeler ses engagements: “Tu avais dit que tu t’arrêterais au bout de 30mn, tu te souviens ?”

 

– L’accompagnement du parent : s’intéresser à ce qu’il fait, à ce qui l’intéresse dans son jeu, ce qui le motive à jouer à tel jeu et non à tel autre… et même… jouer avec lui. Juste pour passer un bon moment, pas pour tout contrôler ! Et aussi l’aider dans ses recherches sur Internet.

 

– Encourager à faire d’autres activités, à sortir, à manipuler, à voir ses copains (mais sans jouer à la console !), à faire du sport.

et il y a aussi… un autre truc, pas évident : limitez notre propre usage des écrans ! Sinon, attention au retour gagnant : “t’as qu’à le faire toi, t’es tout le temps avec ton portable !”

Lors d’ateliers Mon Moment Magique, savez-vous ce qu’on dit les enfants ? Qu’ils aimeraient beaucoup jouer plus avec leurs parents mais qu’ils étaient toujours trop accrochés à leur portable. Pour diminuer le temps d’écran de nos enfants, il pourrait juste suffir de lâcher nous aussi nos portables et de proposer un jeu. Nos enfants sont demandeurs.

 

Dernier point pour limiter les risques, former l’enfant à porter un regard critique sur Internet, c’est le permis Internet.

 

Et pour finir sur une note rassurante, saviez-vous que de nombreuses études soulignent les bienfaits des jeux vidéos ? Rapidité d’exécution, vision périphérique, reconnaissance des formes, réflexes accrus, intelligence stratégique… Toutes ces compétences sont amplifiées par la pratique des jeux vidéos ! Alors, si votre enfant joue beaucoup, pas d’affolement…

 

 

 

Sources :

–  www.sergetisseron.com

Daily Physical Activity and Screen Time, but Not Other Sedentary Activities, Are Associated with Measures of Obesity during Childhood

Relationship between screen time and metabolic syndrome in adolescents

Screen time and sleep among school-aged children and adolescents: A systematic literature review

Video games in education

Effect of action video games on the spatial distribution of visuospatial attention.

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