Comprendre les implicites

 

Hier, j’expliquais à ma fille comment faire une recherche sur Internet. Je lui dis donc: “Dans la barre de recherche, tu tapes les mots importants…”.

 

Voici ce qu’elle a fait :

 

les mots importants - Recherche Ecosia
Barre de recherche du moteur Ecosia. (Plus vous cherchez, plus Ecosia replante des arbres)

 

La veille, elle devait lire en classe un petit texte mettant en scène une petite fille, Camille, à qui il arrivait plein d’aventures. Le soir, elle nous avait raconté à quel point elle avait été dérouté par la question : “Qui est Camille ? “ Ne sachant pas trop quoi répondre, c’était si évident, elle a répondu : “Une fille”

 

Ces anecdotes sont révélatrices de la difficulté qu’ont certains enfants pour comprendre les implicites.

 

Un texte implicite, c’est quoi ?

Un texte implicite, c’est un texte qui ne dit pas tout, et dont le sens doit être extrait par le lecteur. Par conséquent, la signification du texte varie en fonction de celui qui lit.

 

Ce qui n’est pas dit peut être :

déduit : “Camille marchait sous les arbres. Elle s’arrêta pour ramasser des châtaignes sous les feuilles mortes. De derrière un grand chêne surgit une biche effarouchée”. L’inférence, la déduction logique, c’est que Camille est dans la forêt.

présupposé : “Julien enfile son maillot de bain, prend son seau et sa pelle et marche vers l’eau sur le sable”. Dans cet exemple, on suppose que Julien est à la plage. La plupart des enfants devineront où est Julien, le texte s’appuie sur la supposition que le lecteur est familier avec ce genre d’expérience. Mais qu’en serait-il avec un petit Tibétain ?

sous-entendu : “Ah ça c’est malin !” dit sa mère à Marcel en découvrant l’inondation dans la salle de bain et le dentifrice dans le baignoire. Ici, il est clair que ce “c’est malin” n’est pas à prendre au premier degré et qu’il faut plutôt comprendre le contraire.

 

Déductions, présuppositions et sous-entendus sont ce qui donne toute sa valeur au texte, et ces implicites sont des obstacles à la compréhension.

 

Pourquoi parler des implicites ?

Les adultes ont appris à affiner leur jugement et comprennent spontanément des informations implicites sans même réaliser qu’elles en sont. C’est tout simplement évident, mais cela ne l’est pas forcément pour les enfants. Ne pas comprendre ce qui n’est pas explicitement dit les handicape dans la compréhension des textes, les ralentit et peut poser des problèmes à l’école. On ne s’en rend pas compte, mais les énoncés sont très souvent implicites.

 

Voici quelques exemples issus du site Copie double :

 

implicite-bob-et-le-diabete

implicite-signature-en-bas-de-page

implicite-tout-simplement

implicite-voitures-rouges

implicite-je-suis-gabriel

 

Difficile de dire que les enfants ont tort ! Pourtant ils n’ont pas répondu aux attentes des enseignants. Tous les énoncés ont été pris au premier degré…

Le cas des enfants précoces

La compréhension des attentes et de l’implicite est particulièrement délicate pour les enfants à haut potentiel. Admirez la réponse de l’enfant dans cet exemple (toujours issu du site Copie double) :

 

implicite-nombres-suivants

 

Plutôt malin, non ? La réponse proposée par l’enfant va plus loin, et est plus compliquée que ce que l’enseignant attend. Quel intérêt y a t-il à transcrire en lettres ou en chiffres ces nombres ? L’enfant suppose que l’exercice ne peut pas être que ça, et respecte totalement l’énoncé en donnant le nombre suivant. J’espère qu’il a eu une bonne note !

 

Voici ce qu’en dit Jeanne Siaud-Facchin :

 

À l’école les implicites sont nombreux et permettent à l’élève de comprendre et d’anticiper sur ce qu’on lui demande de faire. Par exemple, l’élève sait que lorsque l’enseignant pose une question sur un sujet de cours, il doit y répondre en restituant les connaissances supposées acquises grâce au cours du professeur.
[…] L’enfant surdoué ne partage pas les mêmes implicites. Son mode de pensée, sa compréhension du monde, son analyse de l’environnement diffèrent de l’élève classique. On peut ainsi avoir l’impression que l’enfant ne comprend pas ce qu’on lui demande, ou qu’il ne sait pas ou encore qu’il répond à côté ou fait exactement l’inverse de la consigne. Cet enfant a seulement compris différemment et répond selon sa compréhension personnelle.

 

Comment travailler les implicites ?

En lisant, lisant et lisant ! En lisant à son enfant, et en l’accompagnant dans ses lectures. C’est comme tout, c’est une question de pratique !

Pour cela, on peut s’appuyer sur l’humour. En effet, un des ressorts essentiels des récits humoristiques et des blagues sont les jeux de mots, les sous-entendus, les double sens et des présupposés s’appuyant sur des situations prises à contre-pied.

 

Les enquêtes de l’inspecteur Lafouine, adaptées aux classes du CP au CM2, permettent à travers des histoires rigolotes de travailler la logique et la compréhension de texte.

 

L’académie d’Orléans – Tour propose des exercices de compréhension pour les classes de CE2/CM1/CM2. Ces exercices permettent de travailler l’implicite.

 

Le retour de l’inspecteur Litou, encore une enquête policière et des questions simples mises en ligne par l’académie de Grenoble.

 

et pleins de petits exercices supplémentaires proposés par l’académie de Nancy.

 

Et pour finir, une petite blague… bien implicite !

 

Deux enfants passent devant un panneau Ralentir : école primaire

L’un des deux garçons dit : “Tu te rends compte ! Ils ne croient tout de même pas qu’on va y aller en courant !”

 

 

 

Sources :

Jeanne Siaud-Facchin, “Trouble des apprentissages scolaires et enfants surdoués ?” dans la revue A.N.A.E (mars 2005)

Jean-Pol Rocquet : Reconnaître les implicites et développer une attitude interprétative

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