Pas un matin où l’on ne joue pas avec les enfants en allant à l’école. “Pierre, feuille, ciseaux” ou “devine l’animal que j’ai dans la tête” ou “tu es ma prisonnière, je te ligote les mains avec l’écharpe”
Tout est prétexte au jeu pour les enfants. Jouer avec ses enfants fait leur bonheur. Ils jouent, mais jouons nous suffisamment avec eux ?
Pour Catherine Dumonteil-Kremer, le jeu commence dès la naissance quand le bébé découvre son corps par les sensations que lui renvoie le contact avec le corps de sa mère, la pression légère des mains que le porte, les milles sensations de l’eau du bain et des éclaboussures, les odeurs de la cuisine, la musique qui berce et le contact de la couverture toute douce.
D’après le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, jouer, c’est faire quelque chose qui nous distrait. Pour un enfant nouveau au monde, tout est distraction. Explorer, goûter, toucher, écouter, bouger, sentir… Tout est jeu !
Avez-vous remarqué que si on laisse l’enfant libre de ses activités, il joue tout le temps ? Il passe son temps à jouer ! Le jeu est un besoin fondamental, c’est le travail de l’enfant, et c’est comme cela qu’il apprend naturellement.
Le jeu et les apprentissages
L’enfant n’apprend pas uniquement par le jeu, mais jouer développe de multiples compétences et bénéfices. Le cerveau de l’enfant qui joue, qui rigole, qui s’amuse est réceptif et ouvert, et il apprend sans le savoir.
– Le jeu met l’enfant en mouvement, le rend actif : il y a bien sûr le sport mais chanter, danser, peindre et dessiner lui permettent aussi de comprendre et d’apprendre à maîtriser et affiner ses gestes et ses pensées.
– Le jeu lui permet d’imaginer, d’inventer et de créer des univers virtuels où il se met en scène et reproduit des événements de la vie quotidienne. Jouer avec des personnages, des Playmobils ou des Lego est un moyen de scénariser la vie. Ce peut être un exutoire aux contrariétés ou aux inquiétudes. Par exemple, la mort est souvent présente dans ces fictions, le Playmobil meurt et renaît. Les petites licornes sont blessées, kidnappées, prisonnières et s’évadent… C’est une façon de gérer et d’intégrer ces événements sans traumatisme. Bref, qu’il s’imagine mort ou qu’il ramasse un bout de bois et une large feuille pour simuler une épée et une assiette, l’enfant en jouant apprend à manipuler des symboles.
– En faisant jouer des rôles à ces personnages, ou en se mettant en jeu lui-même, l’enfant planifie et anticipe sur l’histoire. Il structure et développe sa pensée, coordonne ses idées, accroît ses capacités d’abstraction car l’histoire inventée au fur et à mesure doit garder une cohérence.
– En faisant jouer des rôles à ces personnages, l’enfant met du sens dans ses rapports avec ses amis et sa famille.
– L’enfant qui joue devient sensible aux besoins des autres. Il est confronté à des sentiments d’exclusion et de dominance et doit gérer ses émotions. Parfois, il doit apprendre à se contrôler pour être capable de partager le pouvoir, l’espace et les idées avec les autres, et il apprend à faire confiance en l’autre. Il apprend à vivre en société.
– L’enfant tente de mettre en pratique ce qu’il vient d’apprendre, ses nouvelles compétences, ces savoirs tout neufs. Il renforce ces nouveaux acquis et célèbre ce qu’il connaît.
Pourquoi faut-il jouer avec ses enfants ?
Parce qu’il y a urgence ! Chaque jour qui passe rapproche nos enfants du moment où ils quitteront la maison, et ces moments ne reviendront jamais. Alors oublions un peu la paperasse, la maison, les choses utiles et absolument indispensables que nous nous imposons mais qui peuvent attendre une demi-heure et jouons !
Mais d’abord, nous avons des obstacles à surmonter
Alors, oui, jouer n’est pas facile ! Pas facile de se plonger dans l’histoire tarabiscotée des petites voitures qui se font la course ou dans le scénario simpliste des personnages Lego. On a souvent envie de changer l’histoire, d’apporter un peu de complexité, et en premier lieu on n’a pas toujours envie de se mettre à genoux sur le plancher dur. Il y a l’ennui à vaincre et la fatigue de fin de journée. Et oui, quand sommes-nous à la maison et quand retrouvons-nous nos enfants ? Le soir, et c’est justement quand on a envie de souffler un peu ou de foncer vers les “tâches domestiques indispensables” que notre enfant veut jouer. Il n’est pas simple de se rendre disponible !
Il y a aussi une dernière petite chose, surement que vous connaissez cette sensation d’être totalement ridicule que demandent certains jeux : faire le clown, danser sur une musique improbable… Encore un obstacle à dépasser, ce sentiment de gêne… et même s’il n’y a d’autre témoin que notre enfant !
Renforcer le lien et rééquilibrer la relation
Jouer avec son enfant, ce sont des plaisirs partagés et des souvenirs communs qui renforcent les liens familiaux. C’est tisser un fil invisible qui nous relie à notre enfant.
Le jeu est un formidable moyen de se connecter à notre enfant. C’est une méthode toujours efficace pour lui transmettre des messages d’amour, de sécurité et de confiance quel que soit son âge. Nos enfants sont toujours partants pour jouer avec nous, leurs parents.
Catherine Dumonteil-Kremer
Un autre avantage du jeu, en plus de renforcer le lien, est que le jeu laisse le choix aux enfants. Enfin un domaine où c’est leurs décisions qui priment sur celles des adultes. C’est l’enfant qui choisit le jeu et en établit les règles. Jouer avec lui, c’est accepter de lui donner le pouvoir, il est le pilote et nous sommes les passagers. Lui laisser l’opportunité de décider, et jouer avec lui, c’est aussi pour l’enfant gonfler son estime de soi.
Quelques idées de jeux
– Construire une cabane en recouvrant chaises et fauteuils de grands draps : c’est rigolo de se faufiler dessous, et plein d’histoires naissent spontanément
– La pâte à pizza : s’allonger sur le lit, et vous êtes une pâte à pizza. L’enfant mime la préparation, en déposant olives, tartinant la pulpe de tomate sur votre ventre, dépose le jambon, vous tranche la jambe pour découper de belles rondelles de mozzarella… c’est un jeu de contact léger qui lui laisse le choix de savoir à quelle sauce il va vous préparer. Et après, c’est lui qui devient à sont tour la pâte à pizza !
– Les chahuts sur le lit : un des jeux les plus simples, et des plus agréables qui se termine par un câlin et permet de rire et d’évacuer les tensions.
– Dessiner ensemble à l’aventure, sans consigne ni objectif : l’enfant dessine une forme simple, le parent continue, puis l’enfant, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’un dessin prenne forme pour la révélation finale
Et si… le jeu n’était pas bénéfique que pour l’enfant ?
Jouer, cela ne fait pas du bien qu’à l’enfant ! C’est bon pour nous aussi. La connexion enfant-parent qui se crée lors du jeu nous fait du bien et nous relaxe aussi. Nous ne sommes pas tout le temps obligés d’être des adultes sérieux, et le jeu peux nous apporter souplesse d’esprit (et même souplesse du corps !), et recul sur nous-même. Le jeu est un moyen de mieux nous connaître.
Sources:
Catherine Dumonteil-Kremer : Jouons ensemble… autrement
Ministère de l’éducation britannique : Learning, playing and interacting
Ingrid Pramling Samuelsson & Maj Asplund Carlsson (2008) The Playing Learning Child: Towards a pedagogy of early childhood, Scandinavian Journal of Educational Research, 52:6, 623-641, DOI: 10.1080/00313830802497265
je confirme que le jeu de” pierre, feuille, ciseau” inspire les jeunes enfants. Mon petit fils à 4 ans et demi à créé un texte que j’ai eu plaisir à écrire pour le conserver et qu’il puisse le retrouver plus tard. Il était surpris mais heureux de cette mise en écrit de son histoire.