Emotions intenses, et si c’était un enfant hypersensible ?

 

Aujourd’hui nous célébrons un événement : la conférence donnée à Nantes par Muriel devant un public très concerné puis ravi. Une conférence intitulée “Émotions intenses, et si c’était un enfant hypersensible ?”

 

Des émotions intenses

Alors pourquoi parler plus particulièrement des émotions intenses ? Parce-que quand les émotions de nos enfants jouent les montagnes russes, et qu’ils font du yo-yo émotionnel, ils sont emportés dans un tourbillon qui les balade de haut en bas et de bas en haut, et ce tourbillon nous emporte avec eux, nous les parents. Et ce n’est pas très agréable. Le climat à la maison peut en souffrir terriblement, surtout quand ces émotions intenses reviennent chaque jour, ou même plusieurs fois par jour, sans que nous comprenions très bien pourquoi des événements anodins – pour nous – dégénèrent autant pour eux.

 

hypersensibilité -des émotions intenses

 

Rassurez-vous, il existe des solutions pour ramener un climat plus serein en famille et calmer ces émotions. Il y a des outils pour contrer le maléfice de la couture de chaussette ou de l’étiquette en folie. Rappelez-vous, je vous en ai déjà parlé dans “Mon enfant fait trop de bruit, au secours !

Vous savez, toute cette colère qui jaillit quand la fameuse couture de la chaussette n’est pas alignée de façon millimétrée avec l’axe du pied ! C’est aussi le trop plein de lumière le matin qui soulève des cris (et pourtant moins de lumière, c’est plus de lumière du tout !), c’est l’étiquette du nouveau pull qui gratte terriblement au moindre effleurement, l’odeur de la voiture neuve ou l’ingrédient nouveau dans l’assiette qui sont pris en grippe.

 

Ces émotions intenses, c’est l’histoire de ces petites sensations qui dérangent ou de frustrations qui engendrent des réactions explosives. Toute la famille est touchée, et ces explosions peuvent également avoir un impact sur l’entourage et à l’école. Elles nous épuisent, et plus que tout, elles affectent l’enfant qui se sent incompris ou coupable. Car lui seul ressent avec cette intensité des événements que nous pourrions avoir tendance à banaliser, car nous ne les vivons pas de l’intérieur.

 

Cette réactivité accrue aux sensations et aux émotions des autres, c’est ce qu’on appelle l’hypersensibilité.

 

L’hypersensibilité, c’est dû à quoi ?

Les enfants hypersensibles ont des réactions physiologiques intenses en réponse à un événement extérieur. Cela passe par un traitement amplifié de l’information et cela génère une émotion.

 

Les hypersensibles reçoivent une multitude d’informations à traiter en même temps, mais ils font preuve d’hyperesthésie, c’est à dire qu’ils réagissent de façon très forte aux stimuli sensoriels. Leur cerveau, qui n’est pas assez mûr pour traiter toutes ces informations intenses, est débordé et c’est ce qui donne naissance à ces émotions puissantes. Parmi toutes ces informations que le cerveau hypersensible recueille, il y a aussi les émotions des autres et leurs manifestations (leur ton, le stress, la vitesse,…).

 

 

Cerveau et émotions

 

Les psychologues américaines Elaine Aron et Bianca Acevedo ont démontré que chez les hypersensibles :

– Les neurones miroirs, impliqués dans l’empathie, sont plus réactifs,

– Il y a une surexcitation des zones neuronales relatives aux émotions et interactions avec autrui,

– Le cortex insulaire, impliqué dans le dégoût, que l’origine en soit une odeur, un goût ou la vue, est également plus réactif. Le traitement des informations sensorielles est complexe. L’insula joue également un rôle dans les réactions émotionnelles et l’empathie,

– Il y a une surexcitation des zones neuronales relatives à la perception des situations. L’analyse est complexe car beaucoup est perçu, et le traitement de tous ces facteurs demande un peu de temps, ce qui peut donner l’impression que l’enfant est en retrait alors qu’il observe et réfléchit à tout ça.

 

Ce qu’il faut retenir de ces études c’est que l’hypersensibilité est un phénomène biologique bien réel qui touche de 15% à 20% de la population et qui se retrouve plus fréquemment chez les enfants précoces ou les enfants souffrant de trouble de l’attention. Cela aide de se rappeler que même si le comportement de notre enfant nous semble parfois totalement exagéré, il ne fait qu’exprimer des émotions qu’il ressent vraiment avec force. Son cerveau a un fonctionnement émotionnel particulier.

 

L’hypersensibilité en pratique : comment faire ?

L’enfant a besoin d’aide pour apprendre à comprendre et apprivoiser ses émotions car il n’est pas capable de le faire seul. Il a besoin qu’on l’accompagne. En effet, son jeune cerveau n’a pas encore assez d’expériences derrière lui et n’est pas encore assez mûr.

Alors qui va l’aider ? Les adultes ! L’adulte joue un rôle clé dans cet apprentissage de connaissance des émotions et des besoins. Sauf que…l’adulte doit savoir lui-même s’occuper de ses propres émotions. C’est une compétence qui n’arrive pas toute seule par magie. D’ailleurs, nous connaissons tous ce défi à relever : quand l’enfant explose sous le coup des émotions, il faut savoir absorber l’onde de choc sans exploser soi-même.

 

Aider l’enfant hypersensible, c’est en premier lieu s’aider soi-même.

 

Voici donc d’abord quelques outils et méthodes pour nous, les adultes accompagnateurs :

– Apprendre à mieux se connaître, à mieux se comprendre, faire du développement personnel et ne pas hésiter à se faire accompagner car le jeu en vaut la chandelle,

– Utiliser les techniques de la Communication Non Violente de Marshall Rosenberg (la fameuse CNV),

– Utiliser des techniques d’apaisement telles que la respiration, la relaxation ou la méditation,

– Combler nos besoins : réservez vous du temps pour faire votre sport préféré, de l’art, ou une autre activité qui ne sera que pour vous (et dont les bénéfices rejailliront sur toute la famille).

 

hypersensibilité -outils pour les enfants

 

Et voici ensuite quelques outils et méthodes pour lui, notre enfant hypersensible:

– Lui apprendre à se détendre : respiration, relaxation et yoga, ou encore quelques séances d’hypnose ou de sophrologie,

– Lui apprendre à mettre des mots sur ce que les autres ressentent, lui apprendre à mettre des mots sur ce qu’il ressent, par des jeux d’écoute ou de petites mises en scène de théâtre, en lisant les Cahiers Emotions d’Isabelle Filliozat ou en regardant le film Vice-Versa par exemple.

– Créer du lien, mais du lien tactile, physique, par le jeu ou le massage pour faire sortir le trop plein d’émotions intériorisées,

– Lui permettre de se défouler pour évacuer ses d’émotions : boxer un punching-ball, faire du sport, bouger, sauter au parc ou dans le jardin, faire du vélo ou de la trottinette, chahuter sur le lit. Avoir une activités physique de 30 minutes au moins, et si possible en plein air.

– Utiliser la méthode EFT (une technique de petites pressions à des points précis du corps pour libérer les émotions dont on ne veut plus) ou la méthode Vittoz pour l’hyperesthésie (une méthode pour isoler les sensations du corps de la pensée)

 

Et si l’hypersensibilité était une chance ?

Jusqu’ici, j’ai défini l’hypersensibilité comme une manifestation d’intenses émotions difficiles à gérer. Ces émotions sont la conséquence de la très forte réactivité des neurones miroir et de notre cortex insulaire chez l’enfant hypersensible. Mais c’est aussi grâce à ces neurones miroir qui s’activent si fort que l’hypersensible est capable de se mettre à la place de l’autre, de ressentir ce qu’il ressent et de mieux le comprendre. C’est parce que son cerveau est particulier que l’enfant hypersensible possède une forte empathie, une grande intuition et cette sensibilité hors-norme.

 

Cela porte un autre nom : cela s’appelle l’intelligence émotionnelle et ce sera un atout majeur dans sa vie. Cette intelligence émotionnelle peut constituer un facteur de réussite sur le plan relationnel, professionnel, et peut même avoir des effets bénéfiques sur la santé.

 

Pour les parents, avoir un enfant hypersensible c’est l’occasion d’apprendre à mieux se connaître et de grandir avec lui. Et même si cela demande douceur, compréhension et une patience infinie, je suis sûr que vous le savez déjà : avoir un hypersensible à la maison rend la vie plus intéressante, colorée, originale et excitante.

 

 

 

 

 

Sources :

– Elaine Aron, Sensory-Processing Sensitivity and Its Relation to Introversion and Emotionality; 1991

– Elaine Aron, The highly sensitive person: How to thrive when the world overwhelms you, 2013

– Bianca Acevedo, The highly sensitive brain: an fMRI study of sensory processing sensitivity and response to others’ emotions, 2014

– Christiane Rossi et Jacques Durand, Cerveau : sens et émotions

– Gabrielle Sébire et Cécile Stanilewicz, “Avec lui c’est compliqué…: Vivre avec un enfant précoce, l’aider à grandir …”

– Eline Snel, “Calme et attentif comme une grenouille”, (jeux et exercices pour se détendre)

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